Histoire d'a
Il y a quelques jours une araignée moche s'est invitée dans ma cuisine. Les araignées me mettent mal à l'aise, comme tout ce qui a trop de pattes et éventuellement des antennes. Heureusement, après plus de 20 ans de vie rurale, je ne crie plus (ou pas trop fort) et j'arrive à les regarder à condition de ne pas focaliser mon champ de vision. Problème : plus personne sur qui me décharger de la solution à ce désagrément. N'écoutant que ma répulsion, j'ai donc courageusement décidé de la laisser squatter mes murs de cuisine, à condition qu'elle reste dans son coin et ne s'approche pas du mien. Pendant deux jours, nous avons donc cohabité en relative harmonie. Mais j'avais en permanence une sensation de malaise et je ne me sentais plus tout à fait chez moi. Le troisième jour elle avait disparu mais je sais d'expérience que ça ne signifiait pas qu'elle avait quitté les lieux. Le cinquième, elle est réapparue et alors là, pas de quartier : j'avais entre temps décidé de défendre mon territoire et de ne pas céder à l'intimidation (bien involontaire de sa part, j'en conviens). Attrapant mon balai swiffer avec détermination, je l'ai donc envoyée ad patres sans autre état d'âme. Cette créature qui occupait tant de place sur mes murs et dans ma tête s'est avérée en fait bien ordinaire une fois réduite en bouillie. Mais un poids s'était levé, je me sentais à nouveau en sécurité, chez moi, et je savais que je pourrais à nouveau faire face avec succès à la situation.
Il en va de nos problèmes comme des araignées. Lorsque quelque chose nous tracasse ou nous perturbe, quelle qu'en soit la nature, nous avons souvent tendance à faire comme s'il n'en était rien. « Ce n'est pas grave », « Ça va passer », « Je m'en remettrai ». Mais indifférent à nos fanfaronnades, le problème demeure. Loin de disparaître, il se tapit simplement dans un recoin de notre esprit et nous pourrit insidieusement la vie. La seule façon de retrouver notre sérénité est de le regarder en face et de l'écrabouiller : dire les mots que l'on taisait, faire ce que l'on redoutait de faire. Autrement dit, oser. C'est magique : non seulement le problème se racornit avant d'effectivement disparaître, mais on a le sentiment de redevenir totalement maître de son destin. On comprend également que toute situation a une issue et que l'on peut en sortir gagnant.
Merci à toi, araignée, de cette prise de conscience gratifiante. Tu ne seras pas morte en vain !