Karma (2)
Suite et fin de Karma (1)
Par extension, karman signifie la « destinée au sens de la conséquence inéluctable d'actes accomplis dans une existence antérieure » (dictionnaire sanscrit-français de Nadine Stchoupak, Luigia Nitti et Louis Renou). Lorsque nous disons « c’est mon karma », nous entendons en fait « c’est mon destin ». Or, nous dit M. Larousse, la destinée/le destin est la « détermination préétablie des événements de la vie humaine par une puissance supérieure ».
De fait, le destin des hommes (ou de héros les représentant) peut être fixé par les dieux lorsque ceux-ci s'en servent pour réaliser un dessein supérieur (par exemple, satisfaire à la demande de la déesse Terre de débarrasser la terre de trop d’homme mauvais comme dans le Mahābhārata). Mais sur le plan de l'homme individuel, il n’en va pas de même.
Avant d’aller plus loin, n’oublions pas que, dans le contexte où je m’inscris, le but ultime de l’Homme est de vivre la réalisation qu’il est la Conscience source et de s’abandonner à Sa lumière. Chacune de nos vies doit donc être vue comme un chemin de purification, c’est-à-dire de prise de conscience de la Réalité et de dépassement de nos limitations, qui nous met en position d’atteindre ce but.
L’entité de conscience que Nous sommes (ātman, puruṣa, âme, part divine, appelez-la comme vous voulez) arrive dans la vie terrestre avec sur l’épaule un baluchon déjà bien rempli par l’héritage de ses vies antérieures et du corps qu’elle a choisi. Cet héritage lui met en main une feuille de route et des moyens généraux mais ne lui impose ni itinéraire ni « obligation de résultat ».
Le karman-action influe sur le karman-destin de deux manières : en tant qu’actes passés qui orientent notre vie dans une direction donnée et en tant qu’actes présents intervenant eux-mêmes à deux niveaux : « nettoyer » les traces antérieures et déposer les germes du karman-destin suivant. On pourrait dire que notre vie, le karman-destin, est une maison dont nous héritons de nous-mêmes : nous pouvons la conserver dans l’état où nous nous la sommes léguée, la laisser se délabrer ou la modifier. Quoi que nous décidions de faire (karman-action), réfléchissons attentivement aux motivations et aux conséquences à court et long termes de nos aménagements sur notre entourage et nous-même car nous forgeons notre avenir… sur des millénaires. Si nous n’y prenons pas garde, nous nous emprisonnerons dans le cycle des renaissances, autrement dit dans notre « enfer » personnel, au lieu de nous rapprocher du « paradis » que constitue la dissolution ultime dans la Conscience absolue.
Lorsque nous disons « j’ai un bon karma » ou « j’ai un mauvais karma », nous sous-entendons en général que nous sommes récompensés des bonnes actions de nos vies antérieures ou que nous payons nos erreurs passés. Au-delà de la carotte et du bâton, ni bon ni mauvais en soi, le karman-destin nous confronte à la difficulté de l’incarnation, condamnée par ses limitations à avancer à tâtons. Il m'apparaît comme une voie d’enseignement personnelle. Libre à nous d'apprendre ou pas. Libre à nous de stagner, de reculer ou d'avancer. Loin d’une prédétermination extérieure subie, il nous invite à vivre les yeux grand ouverts et nous rappelle qu’au sein des limites fixées par notre condition d’êtres manifestés, nous sommes les maîtres d’une destinée que nous construisons jour après jour.